Que le monde serait fade sans sucre ! On ne pourrait pas apprécier les nombreuses confiseries comme les berlingots, le sucre d’orge, le caramel, et j’en passe.
Mais avant que ces délices n’atteignent nos palais, il aura fallu un long cheminement, tant pour le mot sucre que pour l’élément lui-même. En effet, c’est l’Inde qui a été la première à en produire et ce, depuis les temps anciens. Des manuscrits chinois y font même référence. C’est vers le Ve siècle après J.C. que les Indiens, sous la dynastie Gupta, arrivent à cristalliser le sucre contenu dans la canne, et c’est à ce moment que le miel est supplanté.
Des siècles plus tard, en 1843, les premiers morceaux de sucre apparaissent grâce au Tchèque Jakub Kryštof Rad. En 1875, le Français Eugène François met au point une machine à scier les pains de sucre pour en obtenir des morceaux. Ce n’est qu’en 1949 que le procédé pour l’obtention de carrés réguliers et normalisés — une spécificité française — est inventé par l’ingénieur Louis Chambon. Le procédé est toujours en usage.
Quand au mot sucre, c’est une véritable aventure ! Apparu en France en 1176 avec la graphie çucre :
« Et destranpre suie de miel Et mesle çucre avoeques fiel. » Chrétien de Troyes, Yvain, ou le Chevalier au Lion, manuscrit H1.
Il est passé par le catalan sucre — les Arabes ont introduit la culture de la canne à sucre en Andalousie et en Sicile — et l’italien zucchero, l’arabe sukkar / grec zakhare par Alexandre le Grand (> latin* saccharum), le persan shakar, finalement du sanskrit sharkarâ (sucre en grains).
* « Saccharon et Arabia fert : sed laudatis India. » (Pline L’ancien, Naturalis Historia, xii, chap. 8, vers 70).
La racine sanskrite est commune aux langues d’Europe et du sous-continent indien. Et aussi dans certaines langues austronésienne comme le palawan (Phillipines) où sucre se dit säkal.